Liste des points

4 points de « Amis de Dieu » sont liés à la thématique Pauvreté → détachement.

Si vous désirez à tout moment être maître de vous-mêmes, je vous conseille de fournir un très gros effort pour vous détacher de toute chose, sans crainte ni hésitation. Ensuite, au moment de vous occuper de vos obligations personnelles, familiales… et de les accomplir, utilisez les moyens terrestres honnêtes avec rectitude, en pensant au service de Dieu, à l’Église, à votre famille, à votre tâche professionnelle, à votre pays, à l’humanité tout entière. Dites-vous bien que ce qui est important ne se traduit pas dans le fait de posséder ceci ou de manquer de cela, mais de se conduire en accord avec la vérité que notre foi chrétienne nous enseigne : les biens créés sont des moyens, rien d’autre. Repoussez donc le mirage qui consiste à y voir quelque chose de définitif : Ne vous amassez point de trésors sur la terre, où la mite et le ver consument, où les voleurs perforent et cambriolent. Mais amassez-vous des trésors dans le ciel : là, point de mite ni de ver qui consume, point de voleurs qui perforent et cambriolent. Car là où est ton trésor, là aussi sera ton cœur.

Lorsque quelqu’un axe son bonheur exclusivement sur les choses d’ici-bas — j’ai été témoin de véritables tragédies —, il en pervertit l’usage raisonnable et détruit l’ordre sagement disposé par le Créateur. Son cœur devient alors triste et insatisfait ; il s’engage sur la voie d’un éternel mécontentement et finit par être dès ici-bas esclave, victime de ces mêmes biens qu’il a peut-être atteint au prix d’efforts et de renoncements innombrables. Mais surtout, je vous recommande de ne jamais oublier que Dieu n’a pas de place, n’habite pas un cœur embourbé dans un amour désordonné, grossier, vain. Nul ne peut servir deux maîtres : ou il haïra l’un et aimera l’autre, ou il s’attachera à l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et I’Argent. Fixons donc notre cœur dans l’amour capable de nous rendre heureux… Désirons les trésors du ciel.

Il y a de nombreuses années — plus de vingt-cinq —je me rendais à un réfectoire pour mendiants qui, de toute la journée, n’avaient pour autre nourriture que le repas qu’on leur y servait. C’était un local spacieux dont s’occupaient un groupe de dames dévouées. Après la première distribution, d’autres mendiants s’empressaient de venir recueillir les restes. Un des mendiants de ce second groupe attira mon attention : il possédait une cuillère en étain ! Il la sortait précautionneusement de sa poche, la regardait avec avidité, avec délectation et, lorsqu’il avait terminé de savourer sa pitance, il regardait à nouveau la cuiller et ses yeux semblaient crier : elle est à moi ! Il la léchait ensuite par deux fois pour la nettoyer puis, satisfait, la remettait dans les plis de ses haillons. Elle lui appartenait, en effet, pauvre miséreux qui, parmi ces gens, ses compagnons d’infortune, se considérait riche !

Je connaissais à la même époque une dame de la noblesse, une Grande d’Espagne. Devant Dieu cela ne compte pas : nous sommes tous égaux, tous enfants d’Adam et d’Ève, créatures faibles, bourrées de défauts, capables — si le Seigneur nous abandonne — des pires forfaits. Depuis que le Christ nous a rachetés, il n’y a plus de différence ni de race, ni de langue, ni de couleur, ni de lignage, ni de richesse… : nous sommes tous enfants de Dieu. Cette personne dont je vous parle maintenant habitait dans une noble demeure, mais elle ne dépensait même pas deux pésètes par jour pour elle. En revanche, elle rétribuait généreusement les personnes à son service et consacrait le reste à venir en aide aux nécessiteux, tout en s’imposant à elle-même des privations de toutes sortes. Cette femme ne manquait d’aucun des biens que tant ambitionnent, mais elle était personnellement pauvre, très mortifiée, complètement détachée de tout. Vous m’avez compris ? Nous n’avons d’ailleurs qu’à écouter les paroles du Seigneur : Heureux les pauvres en esprit, car le Royaume des Cieux est à eux.

Si tu veux atteindre cet esprit, je te conseille d’être parcimonieux vis-à-vis de toi-même et très généreux envers les autres ; évite les dépenses superflues, par luxe, caprice, vanité, commodité… ; ne te crée pas de besoins. En un mot, apprends avec saint Paul à savoir te priver et être à l’aise. En tout temps et de toutes manières, je me suis initié à la satiété comme à la faim, à l’abondance comme au dénuement. Je puis tout en Celui qui me rend fort. Et comme l’Apôtre, nous sortirons ainsi vainqueurs de la lutte spirituelle pour peu que nous maintenions notre cœur détaché, libre de toute entrave.

Nous tous qui descendons aux arènes de la foi, dit saint Grégoire le Grand, nous prenons sur nous de lutter contre les esprits malins. Les diables ne possèdent rien en ce monde et, par conséquent, comme ils se présentent nus, nous devons nous aussi lutter nus. Car si un lutteur habillé combat contre un lutteur sans habits, il aura vite fait d’être renversé, car son ennemi y trouvera une prise. Et que sont les choses de la terre sinon une sorte de vêtement ?

Dieu aime celui qui donne avec joie

Dans ce même cadre du détachement total que le Seigneur nous demande, je veux vous indiquer un autre point d’une particulière importance : la santé. Pour la plupart vous êtes actuellement jeunes ; vous traversez cette étape formidable de plénitude de vie, qui déborde d’énergie. Mais le temps passe et l’usure physique commence inexorablement à se faire sentir ; viennent ensuite les limites de l’âge mûr et enfin les infirmités de la vieillesse. De plus, à tout moment, n’importe lequel d’entre nous peut tomber malade ou souffrir d’un trouble corporel.

Ce n’est que si nous profitons en toute droiture, chrétiennement, des époques de bien-être physique, des bonnes périodes, que nous accepterons aussi avec une joie surnaturelle les événements que les gens qualifient à tort de mauvais. Sans vouloir descendre à trop de détails, j’aimerais vous faire part de mon expérience personnelle. Lorsque nous sommes malades, nous pouvons êtres assommants : on ne fait pas attention à moi, personne ne pense à moi, on ne me soigne pas comme je le mérite, personne ne me comprend… Le diable toujours à l’affût, attaque par n’importe quel côté ; et dans la maladie sa tactique consiste à créer une espèce de psychose qui éloigne de Dieu, qui rend l’ambiance amère ou qui détruit le trésor de mérites que l’on obtient pour le bien de toutes les âmes lorsque l’on supporte la souffrance avec un optimisme surnaturel, lorsqu’on l’aime ! Donc si la volonté de Dieu est que le coup de griffe de l’épreuve nous atteigne, acceptez-le comme une preuve qu’il nous juge suffisamment mûrs pour nous associer plus étroitement à sa Croix rédemptrice.

Il faut en effet une préparation lointaine, réalisée chaque jour avec un saint détachement de soi, pour nous disposer à supporter de bonne grâce la maladie ou l’infortune, si Dieu la permet. Servez-vous déjà des occasions courantes, d’une privation quelconque, de la douleur dans ses petites manifestations habituelles, de la mortification, et mettez en pratique les vertus chrétiennes.

Nous devons être exigeants avec nous-mêmes dans la vie quotidienne, afin de ne pas nous inventer de faux problèmes, des besoins artificiels qui, en fin de compte, procèdent de la suffisance, de l’envie, d’un esprit de confort et de paresse. Nous devons aller à Dieu d’un pas rapide, sans poids mort ni bagages qui rendent notre marche difficile. Précisément parce que la pauvreté d’esprit ne consiste pas à ne rien avoir mais à être détachés réellement, nous devons rester sur nos gardes pour ne pas nous laisser tromper par des besoins prétendument de force majeure. Recherchez ce qui suffit, recherchez ce qui est assez. Et ne désirez rien d’autre. Ce qui est en plus est fardeau et non soulagement ; cela nous attriste au lieu de nous remonter.

Quand je vous donne ces conseils, je ne pense pas à des situations étranges, anormales ou compliquées. Je connais quelqu’un qui employait comme signets pour les livres des bouts de papiers sur lesquels il écrivait quelques oraisons jaculatoires qui l’aidaient à maintenir la présence de Dieu. Et il ressentit l’envie de conserver amoureusement ce trésor, jusqu’au jour où il se rendit compte qu’il était en train de s’attacher à ces bouts de papiers de rien du tout. Quel drôle de modèle de vertus ! Peu m’importe de vous montrer toutes mes misères, si cela peut vous servir à quelque chose. J’ai volontairement découvert un peu le pot aux roses, parce qu’il t’arrive peut-être la même chose, à toi aussi : tes livres, tes vêtements, ta table, tes… idoles de quincaillerie.

Dans des cas comme ceux-là, je vous recommande de consulter votre directeur spirituel, sans esprit puéril ou scrupuleux. Il suffira parfois, pour y porter remède, de la petite mortification consistant à se passer de l’utilisation de quelque chose pour une courte durée. Ou dans un autre ordre d’idée, tu peux très bien renoncer un jour sans problème au moyen de transport que tu utilises habituellement et donner en aumône ce que tu auras économisé, même si c’est peu de chose. De toute façon, si tu as l’esprit de détachement, tu découvriras des occasions continuelles, discrètes et efficaces, de l’exercer.

Après avoir ouvert mon âme, je dois vous avouer qu’il y a un attachement auquel je ne voudrais jamais renoncer : celui de vous aimer vraiment tous. Je l’ai appris du meilleur Maître et je voudrais suivre on ne peut plus fidèlement son exemple, en aimant sans limites les âmes, à commencer par ceux qui m’entourent. N’êtes-vous pas émus par la charité ardente, la tendresse de Jésus-Christ que l’évangéliste utilise pour désigner l’un de ses disciples quem diligebat Jesus, celui qu’il aimait ?

Références à la Sainte Écriture
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