Liste des points

5 points de « Quand le Christ passe » sont liés à la thématique Prière → contemplation de la vie du Christ.

Voyez-vous comme il est nécessaire de connaître Jésus, d’observer sa vie avec amour ? Bien souvent je suis allé chercher la définition, la biographie de Jésus dans l’Ecriture. Et je l’ai trouvée en lisant ce que dit en deux mots l’Esprit Saint : pertransiit benefaciendo. Toutes les journées de Jésus-Christ sur la terre, de sa naissance à sa mort, se résument en ceci : pertransiit benefaciendo, il les a remplies en faisant le bien. Et ailleurs, l’Ecriture observe : bene omnia fecit : il a bien fait tout, il a bien achevé toute chose, il n’a rien fait d’autre que du bien.

Mais, toi et moi, où en sommes-nous ? D’un coup d’œil voyons si nous n’avons pas quelque chose à rectifier. Pour ma part, je trouve en moi beaucoup à reprendre. Etant donné que je me vois incapable de faire le bien tout seul, et que Jésus lui-même nous a dit que sans lui nous ne pouvons rien faire, nous allons, toi et moi, implorer l’assistance du Seigneur, par l’intercession de sa Mère, dans ces conversations intimes, propres aux âmes qui s’expriment en fonction de leurs besoins. Au moment même où je vous donne ces conseils, intérieurement et sans bruit de paroles, je me les applique personnellement, en pensant à mes propres faiblesses.

Il convient que nous nous pénétrions de ce que nous révèle la mort du Christ, sans nous arrêter à des formes extérieures ou à des phrases stéréotypées.

Il faut que nous nous plongions véritablement dans les scènes que nous revivons ces jours-ci : la douleur de Jésus, les larmes de sa Mère, la fuite des disciples, le courage des saintes femmes, l’audace de Joseph et de Nicodème, qui demandent à Pilate le corps du Seigneur.

Approchons-nous, en somme, de Jésus mort, de cette Croix qui se détache au sommet du Golgotha. Mais approchons-nous en avec sincérité, en sachant trouver ce recueillement intérieur qui est un signe de maturité chrétienne. Les événements, divins et humains, de la Passion, pénétreront ainsi dans notre âme comme une parole que Dieu nous adresse, pour dévoiler les secrets de notre cœur et nous révéler ce qu’il attend de nos vies.

Il y a de nombreuses années, j’ai vu un tableau qui m’est resté gravé profondément dans la mémoire. Il représentait la Croix du Christ avec, à côté, trois anges : l’un pleurait amèrement, l’autre avait un clou à la main, comme pour se convaincre que tout ceci était vrai ; le troisième était recueilli en prière. Programme toujours actuel pour chacun de nous : pleurer, croire et prier.

Devant la Croix, éprouvons de la douleur pour nos péchés, pour les péchés de l’humanité, qui menèrent Jésus à la mort ; manifestons notre foi, pour pénétrer cette vérité sublime qui dépasse tout entendement et pour nous émerveiller devant l’amour de Dieu ; prions, pour que la vie et la mort du Christ deviennent le modèle et le stimulant de notre vie et de notre générosité Alors seulement nous pourrons nous appeler vainqueurs ; parce que le Christ ressuscité vaincra en nous et la mort se transformera en vie.

C’est cet amour du Christ que chacun d’entre nous doit s’efforcer de réaliser dans sa propre vie. Mais pour être ipse Christus il faut se regarder en lui. Il ne suffit pas d’avoir une idée générale de l’esprit qui était celui de Jésus ; encore faut-il apprendre de lui des manières et des attitudes. Et surtout, il faut contempler sa vie, son passage sur la terre, ses traces, pour en tirer force, lumière, sérénité, paix.

Quand on aime quelqu’un, on désire connaître tous les détails de sa vie et de son caractère, de façon à s’identifier à lui. C’est pourquoi nous devons méditer la vie de Jésus, depuis sa naissance dans une crèche, jusqu’à sa mort et à sa résurrection. Dans les premières années de mon travail sacerdotal, j’avais l’habitude d’offrir des exemplaires de l’Évangile ou de livres racontant la vie de Jésus. Car il nous faut bien la connaître, l’avoir tout entière dans notre tête et dans notre cœur, afin qu’à tout moment, sans qu’il soit besoin d’aucun livre, en fermant les yeux, nous puissions la voir comme dans un film ; afin qu’en toute circonstance les paroles et les actes du Seigneur nous reviennent en mémoire.

C’est ainsi que nous nous sentirons mêlés à sa vie. En effet il ne s’agit pas seulement de penser à Jésus, de nous représenter des scènes de sa vie : nous devons y entrer de plain-pied et en être des acteurs. Nous devons suivre le Christ d’aussi près que la Vierge Marie sa Mère, d’aussi près que les douze apôtres, que les saintes femmes et que les foules qui s’amassaient autour de lui. Si nous agissons de la sorte, si nous n’y faisons pas obstacle, les paroles du Christ pénétreront jusqu’au fond de nos âmes et nous transformeront. Vivante, en effet, est la parole de Dieu, efficace et plus incisive qu’aucun glaive à deux tranchants, elle pénètre jusqu’au point de division de l’âme et de l’esprit, des articulations et des moelles, elle peut juger les sentiments et les pensées du cœur.

Il faut aller à l’Évangile et examiner l’amour du Christ, si nous voulons mener les autres au Seigneur. Nous devons nous arrêter sur les scènes capitales de la Passion, car, comme il l’a dit lui-même, il n’est pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis. Mais nous pouvons considérer également le reste de sa vie, la façon dont il traitait ordinairement ceux qui le rencontraient.

Pour faire parvenir aux humains sa doctrine de salut et leur manifester l’amour de Dieu, le Christ, Dieu parfait et Homme parfait, a procédé d’une manière à la fois humaine et divine. Dieu condescend à devenir homme. Il prend notre nature sans réserves, à l’exception du péché.

J’éprouve une joie profonde à la pensée que le Christ ait voulu être pleinement homme et ait voulu revêtir notre chair. Je suis ému en voyant cette merveille : un Dieu qui aime avec le cœur d’un homme.

Parmi tant de scènes que nous rapportent les évangélistes, attardons-nous à en considérer certaines et commençons par les récits qui nous montrent la façon dont Jésus traitait les Douze. L’apôtre Jean, qui verse dans son Évangile l’expérience de toute une vie, raconte cette première conversation avec le charme de la chose jamais oubliée. “Rabbi — ce mot signifie Maître —, où demeures-tu ?” “Venez et voyez” leur dit-il. Ils allèrent donc et virent où il demeurait et ils restèrent auprès de lui ce jour-là.

Dialogue divin et humain qui a transformé les vies de Jean et d’André, de Pierre, de Jacques et de tant d’autres, et qui a préparé leur cœur à écouter la parole impérieuse que Jésus leur adressait près de la mer de Galilée. Comme il cheminait le long de la mer de Galilée, il aperçut deux frères, Simon — celui qu’on appelle Pierre —et André son frère, qui jetaient l’épervier dans la mer ; car c’étaient des pêcheurs. Il leur dit : “Venez à ma suite et je vous ferai pêcheurs d’hommes.” Aussitôt, laissant là leurs filets, ils le suivirent.

Au cours des trois années suivantes, Jésus vit en compagnie de ses disciples, il les connaît, il répond à leurs questions, il dissipe leurs doutes. C’est le Rabbi, le Maitre qui parle avec autorité, le Messie envoyé par Dieu. Mais il est aussi accessible et proche. Un jour Jésus se retire pour prier ; les disciples se trouvaient non loin, et peut-être le regardaient-ils, essayant de deviner ses paroles. Quand Jésus revient l’un d’entre eux lui demande : Domine doce nos orare, sicut docuit et Ioannes discipulos suos ; apprends-nous à prier, comme Jean l’a appris à ses disciples. Et Jésus leur répondit : “Quand vous priez, dites : Père, que ton Nom soit sanctifié…”.

C’est avec l’autorité d’un Dieu et avec l’amour d’un homme que le Seigneur reçoit aussi les apôtres qui, tout étonnés des fruits de leur première mission, lui parlent des prémices de leur apostolat : Venez, vous-mêmes, à l’écart, dans un lieu désert, et reposez-vous un peu.

Une scène fort semblable se répète vers la fin du séjour de Jésus sur la terre, peu avant l’Ascension. Au lever du jour, Jésus parut sur le rivage ; mais les disciples ne savaient pas que c’était lui. Jésus leur dit : “Les enfants, avez-vous du poisson ?” C’est l’homme qui a posé cette question et c’est Dieu qui poursuit : “Jetez le filet à droite de la barque et vous trouverez.” Ils le jetèrent donc et ils ne parvenaient plus à le relever, tant il était plein de poissons. Le disciple que Jésus aimait dit alors à Pierre : “C’est le Seigneur !”

Et Dieu les attend sur la rive : Une fois descendus à terre, ils aperçoivent un feu de braise, avec du poisson dessus, et du pain. Jésus leur dit : “Apportez de ces poissons que vous venez de prendre” Simon Pierre remonta dans la barque, et tira à terre le filet, plein de gros poissons : cent cinquante-trois ; et quoi qu’il y en eût tant, le filet ne se déchira pas. Jésus leur dit : “Venez déjeuner.” Aucun des disciples n’osait lui demander : “Qui es-tu ?”, car ils savaient bien que c’était le Seigneur. Alors Jésus s’approche, prend le pain et le leur donne ; et il fait de même avec les poissons.

Jésus ne manifeste pas cette délicatesse et cette tendresse seulement à l’égard d’un petit groupe de disciples, mais à l’égard de tous ; à l’égard des saintes femmes, à l’égard des représentants du Sanhédrin tels que Nicodème, à l’égard des publicains tels que Zachée, à l’égard des malades et des bien portants, à l’égard des docteurs de la loi et des païens, à l’égard des individus comme à l’égard des foules.

Les Évangiles nous racontent que Jésus n’avait pas où poser la tête, mais ils nous disent également qu’il avait des amis chers et de confiance, toujours désireux de l’accueillir chez eux. Ils nous parlent également de sa compassion pour les malades, de la peine qu’il éprouvait en présence des ignorants et de ceux qui se trompent. Ils nous parlent de son indignation devant l’hypocrisie. Jésus pleure la mort de Lazare, se fâche contre les marchands qui profanent le temple, et laisse son cœur s’attendrir devant la douleur de la veuve de Naïm.

Chacun de ces gestes humains est un geste de Dieu. Car en lui habite corporellement toute la plénitude de la divinité. Le Christ est Dieu fait homme, homme parfait, homme complet. Et dans l’ordre humain, il nous fait connaître la divinité.

En rappelant cette délicatesse humaine du Christ, qui dépense sa vie au service des autres, nous faisons beaucoup plus que décrire une éventuelle façon de se conduire. Nous sommes en train de découvrir Dieu. Toute œuvre du Christ possède une valeur transcendante : elle nous fait connaître la façon d’être de Dieu, nous invite à croire à l’amour de ce Dieu, qui nous a créés et qui veut nous introduire dans son intimité. J’ai manifesté ton nom aux hommes que tu as tirés du monde pour me les donner. Ils étaient à toi, et tu me les a donnés et ils ont gardé ta parole. Maintenant ils savent que tout ce que tu m’as donné vient de toi, s’écriait Jésus dans la longue prière que nous conserve l’évangéliste Jean.

C’est pourquoi les rapports de Jésus avec les hommes ne restent pas au niveau des paroles ni des attitudes superficielles. Jésus prend l’homme au sérieux et veut lui faire connaître le sens divin de sa vie. Jésus sait être exigeant, il sait placer les hommes face à leurs devoirs, et sait tirer ceux qui l’écoutent de l’aisance et du conformisme, afin de les amener à connaître Dieu trois fois saint. La faim et la douleur émeuvent Jésus, moins toutefois que l’ignorance. En débarquant, il vit une grande foule et il en eut pitié, car ils étaient comme des brebis qui n’ont pas de berger, et il se mit à les instruire longuement.

Application à notre vie ordinaire