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7 points de « Entretiens » sont liés à la thématique Travail → sanctification du travail.

Vous dites et écrivez, depuis des années, que la vocation des laïcs consiste en trois choses : « Sanctifier le travail, se sanctifier dans le travail et sanctifier les autres par le travail. » Pourriez-vous préciser ce que vous entendez exactement par sanctifier le travail ?

C’est difficile à dire en quelques mots car cette expression implique des concepts qui sont au fondement même de la théologie de la Création. Ce que j’ai toujours enseigné – depuis quarante ans – c’est que tout travail humain honnête, intellectuel ou manuel, doit être exécuté par le chrétien avec la plus grande perfection possible : perfection humaine (compétence professionnelle) et perfection chrétienne (par amour pour la volonté de Dieu et au service des hommes). Car, accompli de la sorte, ce travail humain, pour humble et insignifiante que paraisse la tâche, contribue à ordonner chrétiennement les réalités temporelles – à manifester leur dimension divine – et il est assumé et intégré par et dans l’œuvre prodigieuse de la création et de la rédemption du monde. Le travail est ainsi élevé à l’ordre de la grâce, il est sanctifié, devient œuvre de Dieu, operatio Dei, opus Dei.

En rappelant aux chrétiens les paroles merveilleuses de la Genèse – « Dieu a créé l’homme pour travailler » – nous avons fixé notre attention sur l’exemple du Christ, qui a passé la presque totalité de sa vie terrestre à travailler comme artisan dans un village. Nous aimons ce travail humain dont Il a fait sa condition de vie, qu’Il a cultivé et sanctifié. Nous voyons dans le travail – dans le noble effort créateur des hommes – non seulement l’une des plus hautes valeurs humaines, indispensable au progrès de la société et à l’ordonnance de plus en plus juste des rapports entre les hommes, mais encore un signe de l’amour de Dieu pour ses créatures et de l’amour des hommes entre eux et pour Dieu : un moyen de perfection, un chemin de sainteté.

C’est pourquoi le seul objectif de l’Opus Dei a toujours été de contribuer à ce qu’il y ait, au milieu du monde, au milieu des réalités et des aspirations séculières, des hommes et des femmes, de toutes races et de toutes conditions sociales, qui s’attachent à aimer et à servir Dieu et les autres hommes, dans et à travers leur travail ordinaire.

Certains, précisément parce que les laïcs de l’Opus Dei occupent des postes influents dans la société espagnole, parlent de l’influence de l’Opus Dei en Espagne. Pourriez-vous nous expliquer quelle est cette influence ?

Tout ce qui sent la réclame personnelle me gêne profondément. Ce ne serait cependant plus de l’humilité, mais de l’aveuglement et de l’ingratitude envers le Seigneur – qui bénit si généreusement notre travail – que de ne pas reconnaître que l’Opus Dei exerce une réelle influence sur la société espagnole. Dans les pays où l’Œuvre travaille depuis plusieurs années – en Espagne, exactement depuis trente-neuf ans, car Dieu a voulu que notre Association y vît le jour – il est logique que cette influence ait pris une importance sociale grandissante à mesure que progressait notre travail.

De quelle nature est cette influence ? Il est évident que, l’Opus Dei étant une association dont les fins sont spirituelles et apostoliques, son influence – en Espagne comme dans les autres pays des cinq continents où nous travaillons – ne peut être que de nature spirituelle, apostolique. De même que pour l’ensemble de l’Église âme du monde –, l’influence de l’Opus Dei sur la société civile n’a pas de caractère temporel social, politique, économique etc. –, même si elle a des répercussions sur le côté moral de toutes les activités humaines. C’est une influence d’ordre divers et supérieur, qui s’exprime par un verbe précis : sanctifier.

Et cela nous amène à parler des personnes de l’Opus Dei que vous appelez influentes. Pour une association dont le but est de faire de la politique seront influents ceux de ses membres qui occupent un siège au Parlement ou au Conseil des Ministres. Si l’association est culturelle, seront considérés comme influents les membres qui ont un nom dans la philosophie, ou les grands prix littéraires, etc. Si, en revanche, l’association se propose comme c’est le cas de l’Opus Dei – de sanctifier le travail ordinaire des hommes, qu’il soit manuel ou intellectuel, il est évident qu’il faudra considérer comme influents tous ses membres, parce qu’ils travaillent tous – le devoir de travailler qui s’impose à tout homme éveille dans l’Œuvre des échos particuliers, quant à la discipline et à l’ascétisme – et parce que tous ses membres essaient de réaliser leur travail quel qu’il soit saintement, chrétiennement, dans un désir de perfection. Et donc, pour moi, le témoignage d’un de mes enfants, travailleur de la mine, parmi ses compagnons de travail, est aussi influent – aussi important, aussi nécessaire – que celui d’un recteur d’université parmi les membres du corps professoral.

D’où vient donc l’influence de l’Opus Dei ? Le simple examen de la réalité sociologique vous l’indique. Notre Association groupe des personnes de toute condition sociale, de toute profession, de tout âge et de toute situation : femmes et hommes, prêtres et laïcs, vieux et jeunes, célibataires et gens mariés, universitaires, ouvriers, paysans, employés, membres de professions libérales ou fonctionnaires, etc. Avez-vous pensé au pouvoir de rayonnement chrétien que représente une gamme aussi étendue et aussi variée de personnes, et davantage encore si elles se comptent par dizaines de milliers et sont animées d’un même esprit apostolique : sanctifier leur profession ou leur métier – dans le milieu social, quel qu’il soit, où elles évoluent –, se sanctifier dans ce travail et sanctifier par ce travail ?

À ces apostolats personnels, il faut ajouter la croissance de nos œuvres collectives d’apostolat : résidences d’étudiants, centres de rencontres, université de Navarre, centres de formation pour ouvriers et paysans, instituts techniques, collèges, écoles de formation pour la femme, etc. Ces œuvres ont été et sont, indubitablement, des foyers d’où rayonne l’esprit chrétien et qui, fondées par des laïcs, dirigées comme un travail professionnel par des citoyens laïcs, égaux à leurs compagnons qui exercent la même tâche ou le même métier, et ouvertes à des personnes de toutes classes et conditions, ont sensibilisé de vastes couches de la société sur la nécessité de donner une réponse chrétienne aux questions que leur pose l’exercice de leur profession ou de leur emploi.

C’est tout cela qui donne du relief et de l’importance sociale à l’Opus Dei. Et non pas le fait que certains de ses membres occupent des postes humainement influents – chose qui ne nous intéresse pas le moins du monde et qui est, pour cette raison, laissée à la libre décision et à la responsabilité de chacun – mais le fait que tous, et la bonté de Dieu permet qu’ils soient nombreux, accomplissent des tâches y compris les métiers les plus humbles – divinement influentes.

Et c’est logique ; qui donc irait penser que l’influence de l’Église aux États-Unis a commencé le jour où fut élu président le catholique John Kennedy ?

Voudriez-vous expliquer la mission principale et les objectifs de l’Opus Dei ? Sur quels précédents fondez-vous vos idées concernant l’Association ? Ou l’Opus Dei est-il une chose unique, entièrement nouvelle dans l’Église et la chrétienté ? Peut-on le comparer aux ordres religieux et aux instituts séculiers ou encore aux associations catholiques, du genre, par exemple, de la Holy Name Society, des Chevaliers de Colomb, du Christopher Movement, etc. ?

L’Opus Dei se propose d’encourager des gens qui appartiennent à toutes les classes de la société à vivre la plénitude de la vie chrétienne au sein du monde. Autrement dit, l’Opus Dei entend aider les personnes qui vivent dans le monde – le citoyen ordinaire, l’homme de la rue – à mener une vie pleinement chrétienne, sans pour autant modifier leur mode normal d’existence, ni leur travail habituel, ni leurs rêves et aspirations.

Et donc, pour reprendre une phrase que j’écrivais il y a de nombreuses années, on peut dire que l’Opus Dei est à la fois ancien et nouveau comme l’Évangile. Il s’agit de rappeler aux chrétiens les paroles merveilleuses qu’on lit dans la Genèse : Dieu a créé l’homme pour qu’il travaille. Nous avons fixé les yeux sur l’exemple du Christ, qui a passé la quasi totalité de sa vie terrestre à travailler comme artisan dans un village. Le travail n’est pas seulement une des plus hautes valeurs humaines et le moyen par lequel les hommes doivent contribuer au progrès de la société : c’est encore un chemin de sanctification.

À quelles autres organisations pourrions-nous comparer l’Opus Dei ? Il n’est pas facile de répondre à cette question, car si l’on tente de comparer entre elles des organisations qui ont des buts spirituels, on court le risque de ne retenir que des traits extérieurs ou des appellations juridiques et d’oublier ce qu’il y a de plus important : l’esprit qui leur donne vie et raison d’être.

Je me bornerai à vous dire, par rapport aux organisations que vous avec mentionnées, que l’Opus Dei est très éloigné des ordres religieux et des instituts séculiers et plus proche des institutions telles que la Holy Name Society.

L’Opus Dei est une organisation internationale de laïcs, dont font aussi partie des prêtres séculiers (une minorité très faible comparativement au nombre total des membres). Ses membres sont des gens qui vivent dans le monde, où ils exercent une profession ou un métier. Lorsqu’ils viennent à l’Opus Dei, ils n’abandonnent pas ce travail, mais, au contraire, ils cherchent une aide spirituelle afin de sanctifier ce travail habituel qu’ils transforment, en outre, en moyen de se sanctifier ou d’aider les autres à se sanctifier. Ils ne changent pas d’état – ils restent célibataires, mariés, veufs ou ils restent prêtres s’ils le sont, – mais ils s’appliquent à servir Dieu et les autres hommes au sein même de cet état. L’Opus Dei n’exige ni vœux ni promesses. Ce qu’il demande à ses membres, c’est de s’efforcer, au milieu des déficiences et des erreurs inhérentes à toute vie humaine, de pratiquer les vertus humaines et chrétiennes, et de se savoir enfants de Dieu.

Si l’on tient absolument à faire une comparaison pour comprendre l’Opus Dei, le plus simple est de songer à la vie des premiers chrétiens. Ils vivaient à fond leur vocation chrétienne ; ils recherchaient sérieusement la sainteté à laquelle ils étaient appelés par le fait, simple et sublime, du baptême. Ils ne se distinguaient pas extérieurement des autres citoyens. Les membres de l’Opus Dei sont des citoyens ordinaires ; ils accomplissent un travail ordinaire ; ils vivent au milieu du monde, y étant ce qu’ils sont : des citoyens chrétiens qui entendent satisfaire pleinement aux exigences de leur foi.

Pouvez-vous me dire comment, depuis ses origines, l’Opus Dei s’est développé et a évolué, dans son caractère tout comme dans ses objectifs, au cours de cette période qui coïncide avec l’énorme changement dont nous sommes témoins au sein de l’Église elle-même ?

Dès le départ, le seul objectif de l’Opus Dei a été celui que je viens de vous indiquer : faire en sorte qu’il y ait, au milieu du monde, des hommes et des femmes de toutes races et de toutes conditions sociales, qui s’efforcent d’aimer et de servir Dieu et leurs semblables dans et par le travail ordinaire. Dès le début de l’Œuvre, en 1928, j’ai prêché que la sainteté n’est pas réservée à des privilégiés, mais que tous les chemins de la terre peuvent être divins : tous les états, toutes les professions, toutes les tâches honnêtes. Les implications de ce message sont nombreuses et l’expérience, au cours de la vie de l’Œuvre, m’a permis de les connaître de plus en plus profondément et avec toujours plus de nuances. L’Œuvre, modeste à sa naissance, s’est fortifiée normalement, d’une manière graduelle et progressive, comme grandit tout organisme vivant, tout ce qui se développe dans l’histoire.

Mais son objectif et sa raison d’être n’ont pas changé et ne changeront pas, quelque transformation que puisse subir la société, le message de l’Opus Dei étant que l’on peut se sanctifier dans n’importe quel travail honnête, quelles que soient les circonstances où on l’accomplit.

Aujourd’hui font partie de l’Œuvre des gens de toutes professions : non seulement des médecins, des avocats, des ingénieurs et des artistes, mais encore des maçons, des mineurs, des paysans ; et de n’importe quel métier : depuis les metteurs en scène de cinéma et les pilotes d’avion à réaction jusqu’aux spécialistes de la haute coiffure. Pour les membres de l’Opus Dei, se mettre au goût du jour, comprendre le monde moderne, est une chose naturelle et instinctive, étant donné qu’ils vivent aux côtés des autres citoyens et qu’avec ces autres citoyens et au même titre qu’eux ils créent ce monde et contribuent à sa modernité.

L’esprit de notre Œuvre étant tel, nous nous sommes réjouis, vous le comprendrez, d’entendre le Concile déclarer solennellement que l’Église ne rejette ni le monde où elle vit, ni son progrès, ni son développement, mais qu’elle le comprend et qu’elle l’aime. Au surplus, une caractéristique essentielle de la spiritualité dans laquelle s’efforcent de vivre – depuis près de quarante ans – les membres de l’Œuvre, est de se savoir, à la fois, partie intégrante de l’Église et partie intégrante de l’État, chacun assumant donc pleinement, et en toute liberté, sa responsabilité individuelle de chrétien et de citoyen.

Pourriez-vous nous indiquer les différences qu’il y a entre la manière dont l’Opus Dei, en tant qu’association, remplit sa mission et celle dont les membres de l’Opus Dei, en tant qu’individus, remplissent la leur ? Par exemple, en vertu de quels critères est-il décidé qu’un projet sera plus favorablement réalisé par l’Association – un collège ou un centre de rencontres – ou par des individus – une entreprise d’édition ou de commerce ?

L’Opus Dei a pour activité principale de donner à ses membres, et aux personnes qui le désirent, les moyens spirituels nécessaires pour vivre dans le monde en bons chrétiens. Il leur fait connaître la doctrine du Christ, les enseignements de l’Église ; il leur insuffle une mentalité qui les amène à bien travailler par amour de Dieu et au service de tous les hommes. Il s’agit, en un mot, de se conduire en chrétien : en s’entendant avec tout le monde, en respectant la liberté légitime de chacun et en faisant en sorte que notre monde soit plus juste.

Chacun des membres gagne sa vie et sert la société grâce au métier qui était le sien avant d’entrer à l’Opus Dei, et qui le serait s’il n’appartenait pas à l’Œuvre. Ainsi, les uns sont mineurs, d’autres enseignent dans des écoles ou des universités, d’autres encore sont commerçants, ménagères, secrétaires, paysans. Il n’y a aucune activité humaine, pourvu qu’elle soit honnête, à laquelle ne puisse se livrer un membre de l’Opus Dei. Celui qui, avant son adhésion à l’Œuvre, travaillait, par exemple, dans une maison d’édition ou de commerce, continue à le faire par la suite. Et si, dans le cadre de ce travail ou de n’importe quel autre, il cherche un nouvel emploi ou s’il décide, avec ses collègues, de fonder une entreprise quelconque, il lui appartient d’y prendre librement des décisions, de recueillir personnellement les fruits de son occupation, et aussi bien d’en assumer la responsabilité personnelle.

Toute l’activité des dirigeants de l’Opus Dei se fonde sur un respect absolu de la liberté professionnelle de chacun, c’est là un point dont l’importance est capitale et dont dépend l’existence même de l’Œuvre. Cette liberté est donc fidèlement sauvegardée. Chaque membre peut exercer la profession qu’il exercerait s’il ne faisait pas partie de l’Opus Dei, de sorte que ni l’Opus Dei en tant que tel ni aucun des autres membres n’ont rien à voir avec le travail professionnel de chacun en particulier. Tous prennent un engagement, lorsqu’ils adhèrent à l’Œuvre : celui de s’appliquer à rechercher la plénitude de la vie chrétienne à l’occasion et par le moyen de leur travail, et à prendre une conscience plus claire du caractère de service rendu à l’humanité que doit revêtir toute vie chrétienne.

La mission principale de l’Œuvre – je vous l’ai déjà dit – est donc de former chrétiennement ses membres et les autres personnes qui souhaitent recevoir cette formation. Le désir de contribuer à la solution des problèmes qui affectent la société et auxquels l’idéal chrétien peut apporter tant de solutions, implique que l’Œuvre en tant que telle, collectivement, réalise certaines activités et prenne certaines initiatives. Le critère dans ce domaine est que l’Opus Dei, dont les fins sont exclusivement spirituelles, ne peut assumer collectivement que des tâches qui constituent clairement et immédiatement un service chrétien, un apostolat. Il serait absurde de penser que l’Opus Dei en tant que tel puisse se consacrer à l’exploitation des mines ou à des entreprises d’ordre économique, quelles qu’elles soient. Ses œuvres collectives sont, toutes, des activités directement apostoliques : écoles de formation paysanne, dispensaires installés dans une région ou un pays en voie de développement, centres destinés à la promotion sociale de la femme, etc. Autrement dit, des établissements d’assistance, d’éducation ou de bienfaisance, comme ceux que fondent, dans le monde entier, les institutions de toutes croyances.

Pour mener ces tâches à bien, l’Opus Dei compte d’abord sur le travail personnel de ses membres qui parfois s’y emploient entièrement. Et aussi sur le soutien généreux que nous apportent quantité de sympathisants, qu’ils soient chrétiens ou non. Certains sont attirés par des raisons spirituelles ; d’autres, sans même partager ces vues apostoliques, estiment qu’il s’agit là d’initiatives qui tournent au bénéfice de la société et sont ouvertes à tous, sans discrimination de race, de religion ou d’idéologie .

Comment l’Opus Dei se développe-t-il dans les pays autres que l’Espagne ? Quelle est son influence aux États-Unis, en Angleterre, en Italie, etc. ?

Actuellement, font partie de l’Opus Dei des ressortissants de quatre-vingts nations, qui travaillent dans tous les pays d’Amérique et d’Europe occidentale et dans certains pays d’Afrique, d’Asie et d’Océanie.

L’influence de l’Opus Dei, dans tous ces pays, est une influence spirituelle. Il s’agit essentiellement d’aider les personnes qui s’approchent de nous à vivre l’esprit évangélique avec une plénitude accrue dans leur existence quotidienne. Ces personnes travaillent dans les milieux les plus variés ; il y a, parmi elles, des paysans qui cultivent la terre dans des villages perdus de la chaîne des Andes, et aussi des banquiers de Wall Street. L’Opus Dei leur enseigne que le travail courant – qu’il soit humble ou brillant dans l’ordre humain – est d’une haute valeur et peut être le moyen très efficace d’aimer et de servir Dieu et le prochain. Il leur enseigne à aimer tous les hommes, à respecter leur liberté, à travailler – en toute autonomie, comme bon leur semblera –, à supprimer l’incompréhension et l’intolérance parmi les hommes et à rendre la société plus juste. Telle est la seule influence que l’Opus Dei exerce partout où il agit.

Quant aux œuvres sociales et éducatives que l’Opus Dei fonde directement, je vous dirai qu’elles répondent aux conditions locales et aux besoins de la société. Je ne possède aucun renseignement précis sur ces fondations, car, comme je vous l’expliquais, notre organisation est fort décentralisée. Je pourrais mentionner, comme un exemple parmi beaucoup d’autres, le Midtown Sports and Cultural Center, dans le Near West Side de Chicago qui propose des programmes éducatifs et sportifs aux habitants du quartier. Sa mission consiste, pour une part importante, à encourager la coexistence et la bonne entente entre les différents groupes ethniques. Un autre travail intéressant se fait à Washington, à The Heights, où sont donnés des cours d’orientation professionnelle, avec programmes spéciaux pour étudiants particulièrement doués, etc.

Pour ce qui est de l’Angleterre, on pourrait signaler les résidences universitaires qui, outre la pension, offrent aux étudiants divers programmes d’études qui complètent leur formation culturelle, humaine et spirituelle. Netherhall House, à Londres, mérite peut-être une mention spéciale en raison de son caractère international. Des étudiants de plus de cinquante pays y ont habité, dont beaucoup ne sont pas chrétiens, car les maisons de l’Opus Dei sont ouvertes à tous sans discrimination de race ou de religion.

Pour ne pas m’étendre davantage, je ne citerai que le Centro Internazionale della Gioventù lavoratrice, à Rome. Ce centre, qui a pour tâche la formation professionnelle des jeunes ouvriers, fut confié à l’Opus Dei par le pape Jean XXIII et inauguré par Paul VI, il y a moins d’un an.

Cette doctrine de la Sainte Écriture qui est, comme vous le savez, au centre même de l’esprit de l’Opus Dei, doit vous mener à réaliser votre travail avec perfection, à aimer Dieu et les hommes en faisant avec amour les petites choses habituelles de la journée, découvrant ainsi ce quelque chose de divin qui se trouve enfermé dans les détails. Comme ils viennent à propos ces vers du poète castillan :

Tout doucement, tournez bien les lettres :

Bien faire les choses

Est plus important que de les faire .

Je vous assure, mes enfants, que lorsqu’un chrétien accomplit avec amour les actions quotidiennes les moins transcendantes, ce qu’il fait déborde de transcendance divine. Voilà pourquoi je vous ai dit, répété et ressassé inlassablement, que la vocation chrétienne consiste à convertir en alexandrins la prose de chaque jour. Sur la ligne de l’horizon, mes enfants, le ciel et le terre semblent se rejoindre. Mais non, là où ils s’unissent, en réalité, c’est dans vos cœurs, lorsque vous vivez saintement la vie ordinaire…

Vivre saintement la vie ordinaire, vous disais-je à l’instant. Et par ces mots, j’entends le programme tout entier de vos préoccupations quotidiennes. Laissez donc les rêves, les faux idéalismes, les fantaisies, en un mot, ce que j’ai coutume d’appeler la mystique du si – ah ! si je ne m’étais pas marié, ah ! si je n’avais pas cette profession, ah ! si j’avais une meilleure santé, ah ! si j’étais jeune, ah ! si j’étais vieux ! – et, en revanche, tenez-vous-en à la réalité la plus matérielle et la plus immédiate, car c’est là que se trouve le Seigneur : Voyez mes mains et mes pieds, dit Jésus ressuscité : C’est bien moi ! Touchez-moi et rendez-vous compte qu’un esprit n’a ni chair ni os, comme vous voyez que j’en ai .

Ils sont multiples, les aspects du milieu séculier où vous évoluez, qu’éclairent ces vérités. Pensez, par exemple, à l’ensemble de vos activités en tant que citoyens dans la vie civile. Un homme qui sait que le monde – et non seulement l’église – est son lieu de rencontre avec le Christ, aime ce monde, tâche d’acquérir une bonne préparation intellectuelle et professionnelle, établit en toute liberté ses propres jugements sur les problèmes du milieu où il évolue ; et, par conséquent, il prend ses propres décisions, lesquelles, parce qu’elles sont les décisions d’un chrétien, procèdent en outre d’une réflexion personnelle, qui tente humblement de saisir la volonté de Dieu dans les détails, petits et grands, de la vie.

Références à la Sainte Écriture
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