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3 points de « Amis de Dieu » sont liés à la thématique Tiédeur → la Croix du Christ.

Jésus s’est livré lui-même, s’offrant en holocauste par amour. Et toi, disciple du Christ, toi, fils préféré de Dieu, toi, qui as été acheté au prix de la Croix, toi aussi tu dois être prêt à te renier toi-même. C’est pourquoi, quelles que soient les circonstances concrètes dans lesquelles nous nous trouvons, ni toi ni moi nous ne pouvons nous comporter de façon égoïste, embourgeoisée, confortable, dissipée… et, pardonne ma sincérité, imbécile ! Si tu recherches l’estime des hommes, si tu désires être bien considéré ou apprécié, et si tu ne cherches qu’à mener une vie confortable, tu t’es égaré sur ta route… Dans la cité des saints, seuls peuvent entrer, se reposer et régner avec le Roi pour l’éternité ceux qui ont parcouru la voie dure, resserrée et étroite des tribulations.

Tu dois te décider volontairement à porter la Croix. Sinon tu diras en paroles que tu imites le Christ, mais tes actions le démentiront ; et tu ne pourras pas entrer dans l’intimité du Maître, ni l’aimer vraiment. Il est urgent que nous autres chrétiens, nous soyons bien convaincus de cette réalité : nous ne suivons pas de près le Seigneur quand nous ne savons pas nous priver spontanément de toutes les choses que réclament le caprice, la vanité, le plaisir, l’intérêt… Pas une seule journée ne doit s’écouler sans que tu l’aies assaisonnée de la grâce et du sel de la mortification. Repousse aussi l’idée que tu en seras malheureux. Quel pauvre bonheur que le tien, si tu n’apprenais pas à te vaincre, si tu te laissais écraser et dominer par tes passions et tes velléités, au lieu de prendre ta croix courageusement.

Je me rappelle à présent — certains d’entre vous m’ont sûrement entendu faire ce même commentaire dans d’autres méditations — le rêve d’un écrivain du siècle d’or espagnol. Deux chemins s’ouvrent devant lui. Le premier apparaît large et carrossable, aisé, bien pourvu en auberges, hôtelleries et autres endroits agréables et plaisants. Des gens y avancent à cheval ou en carrosse, au milieu de musiques et de rires — des éclats de rire fous ; l’on y découvre une foule enivrée par des plaisirs apparents, éphémères, car cette route conduit à un précipice sans fond. C’est le chemin qu’empruntent les mondains, les éternels embourgeoisés ; ils affichent une joie qu’en fait ils n’ont pas ; ils cherchent insatiablement toutes sortes de commodités et de plaisirs… ; la douleur, le renoncement, le sacrifice leur font horreur. Ils ne veulent pas entendre parler de la Croix du Christ, qui leur paraît être une affaire de fous. En réalité, ce sont eux les fous : esclaves de l’envie, de la gourmandise, de la sensualité, ils finissent par souffrir bien davantage et ils se rendent compte trop tard qu’ils ont vendu leur bonheur terrestre et éternel à vil prix, pour une bagatelle insipide. Le Seigneur nous prévient : Qui veut sauver sa vie la perdra, mais celui qui perd sa vie à cause de moi la trouvera. Que servira-t-il donc à l’homme de gagner le monde entier, s’il ruine sa propre vie ?

Dans ce songe, un autre sentier prend une direction différente : il est si étroit et sa pente est si raide qu’il est impossible de le parcourir à cheval. Tous ceux qui l’empruntent avancent à pied, peut-être en zigzaguant, mais le visage serein, foulant des chardons et contournant des rochers. Par endroits, ils abandonnent des lambeaux de leurs vêtements et même de leur chair. Mais un verger les attend au bout, le bonheur pour toujours, le Ciel. C’est le chemin des âmes saintes qui s’humilient ; qui, par amour pour Jésus-Christ, se sacrifient avec joie pour les autres ; la route de ceux qui ne craignent pas de grimper, chargés amoureusement de leur Croix, aussi lourde soit-elle, car ils savent que si le poids les renverse, ils pourront se relever et continuer l’ascension : le Christ est la force de ces voyageurs.

Qu’importe de trébucher si nous trouvons dans la douleur de la chute l’énergie qui nous aide à nous relever et nous pousse à continuer avec un courage renouvelé ? N’oubliez pas que le saint n’est pas celui qui ne tombe jamais, mais celui qui se relève toujours, humblement et avec une sainte opiniâtreté. S’il est écrit au livre des Proverbes que le juste tombe sept fois par jour, toi et moi, pauvres créatures, nous ne devons pas nous étonner ni nous décourager devant nos misères personnelles, devant nos faux pas. Nous irons toujours de l’avant si nous cherchons la force d’âme auprès de Celui qui nous a promis : Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et ployez sous le fardeau, et je vous soulagerai. Merci, Seigneur, quia tu es, Deus, fortitudo mea, car tu as toujours été, toi, et toi seul, mon Dieu, ma force, mon refuge, mon appui.

Sois humble, si tu veux vraiment progresser dans la vie intérieure. Aie recours avec constance, avec confiance à l’aide du Seigneur et de sa Mère bénie, qui est aussi ta Mère. Avec sérénité, tranquillement, si douloureuse que soit la blessure encore ouverte de ta dernière chute, étreins une fois encore la croix et dis : Seigneur, avec ton aide, je lutterai pour ne pas m’arrêter, je répondrai fidèlement à tes invitations sans craindre les pentes abruptes, ni la monotonie apparente du travail habituel, ni les chardons et les cailloux du chemin. J’ai la certitude que ta miséricorde m’assiste et qu’à la fin je trouverai le bonheur éternel, la joie et l’amour pour les siècles sans fin.

Et puis, dans ce même songe, l’écrivain découvrait un troisième itinéraire : étroit, lui aussi plein d’aspérités et de pentes raides comme le second. Quelques personnes y cheminaient au milieu de mille épreuves, mais avec une allure solennelle et majestueuse. Cependant, elles débouchaient sur le même précipice horrible auquel le premier sentier conduisait. C’est le chemin que parcourent les hypocrites, ceux qui manquent de droiture d’intention, ceux qui sont mûs par un faux zèle, ceux qui pervertissent les œuvres divines en les mêlant à des égoïsmes temporels. C’est de la folie que de s’engager dans une dure entreprise dans le but d’être admiré ; d’observer les commandements de Dieu au prix d’un effort pénible, pour aspirer à une récompense terrestre. Celui qui prétend retirer des profits humains de l’exercice des vertus est semblable à celui qui ferait une mauvaise affaire en vendant un objet de valeur pour quelques sous : il aurait pu gagner le Ciel et, au lieu de cela, il s’est contenté d’une louange éphémère… C’est pourquoi l’on dit que les espérances des hypocrites sont comme une toile d’araignée : il faut beaucoup d’efforts pour la tisser et à la fin le vent de la mort l’emporte d’un souffle.

Le regard tourné vers le but

Références à la Sainte Écriture