Liste des points

9 points de « Amis de Dieu » sont liés à la thématique Vie ordinaire → filiation divine et prière vivante.

Pour de tout autres raisons, qu’il ne sied pas de rappeler mais que Jésus, qui nous préside depuis le tabernacle, connaît bien, mon existence m’a conduit à me sentir tout spécialement fils de Dieu ; j’ai pu goûter la joie de me blottir contre le cœur de mon Père, pour rectifier, pour me purifier, pour le servir, pour comprendre et excuser tout le monde, à partir de son amour et de mon humiliation.

Aussi voudrais-je insister maintenant sur la nécessité pour vous et pour moi de nous ressaisir, de sortir de cet engourdissement provoqué par notre faiblesse, et qui nous assoupit si facilement. Nous recommencerons alors à percevoir, de façon plus profonde et plus immédiate, la réalité de notre condition d’enfants de Dieu.

L’exemple de Jésus, le passage du Christ sur cette terre d’Orient, nous aident à nous pénétrer de cette vérité. Si nous recevons le témoignage des hommes, lisons-nous dans l’épître de Jean, le témoignage de Dieu est plus grand. Le témoignage de Dieu, en quoi consiste-t-il donc ? Saint Jean nous dit encore : Voyez quel grand amour a donné le Père pour que nous soyons appelés enfants de Dieu, car nous le sommes… Bien-aimés, dès maintenant nous sommes enfants de Dieu.

Au fil des années, j’ai tâché de m’appuyer sans défaillir sur cette réalité si encourageante. Ma prière, en toute circonstance, a toujours été la même, à quelques nuances près. Je lui ai dit : Seigneur, c’est toi qui m’as placé ici ; toi qui m’as confié ceci ou cela, et moi, j’ai confiance en toi. Je sais que tu es mon Père, et j’ai toujours observé que les tout-petits ont une confiance totale en leurs parents. Mon expérience sacerdotale m’a confirmé que cet abandon dans les mains de Dieu porte les âmes à acquérir une piété forte, profonde et sereine, qui les pousse à travailler constamment avec droiture d’intention.

L’exemple de Jésus-Christ

Quasi modo geniti infantes… Avec joie j’ai répandu partout cette idée : nous sommes de petits enfants de Dieu. Elle nous fait savourer les paroles que nous retrouvons aussi dans la liturgie de la Messe : tout ce qui est né de Dieu est vainqueur du monde, surmonte les difficultés, remporte la victoire, dans cette grande bataille pour la paix dans les âmes et dans la société.

Notre sagesse et notre force nous viennent précisément de la conviction de notre petitesse, de notre néant devant Dieu. Mais c’est Lui qui, en même temps, nous pousse à agir avec une assurance confiante et à prêcher Jésus-Christ, son Fils Unique, en dépit de nos erreurs et de nos misères personnelles, à condition que notre faiblesse s’accompagne d’une volonté de lutter pour en venir à bout.

Vous m’avez sans doute entendu reprendre souvent ce conseil de l’Écriture : discite benefacere. Nous devons en effet apprendre et enseigner à faire le bien. Il nous faut commencer par nous-mêmes, en nous appliquant à découvrir quel est ce bien que nous devons rechercher ardemment pour nous, pour chacun de nos amis et pour tout homme. Je ne connais point de meilleure façon de considérer la grandeur de Dieu que de se placer sous cet angle ineffable et pourtant simple : il est bien notre Père et nous sommes ses enfants.

À l’heure de faire porter notre examen sur ce qu’est et devrait être notre vie de piété, sur quels points précis nous devrions améliorer notre relation personnelle avec Dieu, si vous m’avez bien suivi, vous repousserez la tentation de bâtir des châteaux en Espagne, car vous aurez découvert que le Seigneur se contente que nous lui offrions à chaque instant de petites marques d’amour.

Essaie de t’en tenir à un plan de vie, avec constance : quelques minutes de prière mentale ; l’assistance à la sainte Messe, tous les jours si possible, et la communion fréquente ; un recours assidu au saint sacrement du Pardon, même si ta conscience ne te reproche pas de péché mortel ; la visite à Jésus dans le tabernacle ; la récitation et la contemplation des mystères du Saint Rosaire, et tant de merveilleuses pratiques de piété que tu connais bien ou que tu peux apprendre.

Elles ne doivent pas devenir des normes rigides, tels des compartiments étanches ; elles indiquent un itinéraire souple, adapté à ta condition d’homme qui vit en pleine rue, accomplissant un travail professionnel intense, et ayant des obligations et des relations sociales que tu ne dois pas négliger, car c’est dans ces occupations-là que se poursuit ta rencontre avec Dieu. Ton plan de vie sera comme ce gant élastique qui s’adapte parfaitement à la main qui l’enfile.

N’oublie pas non plus que l’essentiel n’est pas de faire beaucoup de choses ; limite-toi généreusement à celles que tu peux mener à bien tous les jours, que tu en aies envie ou non. Ces pratiques te mèneront presque insensiblement à la prière contemplative. Des actes d’amour plus nombreux naîtront dans ton âme, des oraisons jaculatoires, des actions de grâce, des actes de réparation, des communions spirituelles. Et cela, tout en accomplissant tes obligations : en décrochant ton téléphone, en prenant un moyen de transport, en ouvrant ou en fermant une porte, en passant devant une église, avant de te mettre au travail, en le réalisant ou en l’achevant. Tu sauras tout rapporter à Dieu ton Père.

Reposez-vous sur la filiation divine. Dieu est un Père débordant de tendresse, d’un amour infini. Appelle-le « Père » souvent dans la journée et dis-lui, seul à seul, dans ton cœur, que tu l’aimes, que tu l’adores, que tu ressens la fierté et la force d’être son fils. Tu as là un authentique programme de vie intérieure que tu dois canaliser dans tes relations de piété avec Dieu, peu nombreuses, mais constantes, j’insiste, qui te permettront d’acquérir les sentiments et les façons d’être d’un bon fils.

Je dois encore te prévenir contre le danger de la routine, véritable sépulcre de la piété, qui se cache fréquemment sous l’ambition de réaliser ou d’entreprendre de grandes choses, alors que l’on néglige, par commodité, les obligations quotidiennes. Lorsque tu percevras ces insinuations, mets-toi en présence de Dieu avec sincérité : vois si tu n’es pas las de toujours lutter sur les mêmes points, parce que tu ne cherchais pas Dieu ; regarde si, par manque de générosité, d’esprit de sacrifice, ta persévérance fidèle dans le travail ne s’est pas affaiblie. Tes normes de piété, tes petites mortifications, ton activité apostolique qui ne produit pas de fruits immédiats te semblent alors terriblement stériles. Nous nous sentons vides et nous commençons peut-être à échafauder de nouveaux projets, pour faire taire la voix de notre Père du Ciel qui nous réclame une loyauté totale. Et avec ce « cauchemar » de rêves grandioses dans notre âme nous oublions la réalité la plus sûre, le chemin qui nous mène tout droit à la sainteté : c’est le signe le plus évident que nous avons perdu le point de vue surnaturel ; la conviction que nous sommes des tout-petits ; la certitude des merveilles que notre Père est prêt à opérer en nous si nous recommençons avec humilité.

Les balises rouges

Mon jeune esprit fut fortement frappé par les balises que l’on trouvait sur les bords des chemins dans nos montagnes ; c’était chez moi de grands pieux, généralement peints en rouge. On m’avait expliqué alors que ces poteaux dépassent lorsque la neige a recouvert sentiers, terres ensemencées, pâturages, forêts, rochers et précipices. Ils sont un point de repère sûr pour que tout voyageur puisse à tout moment savoir par où passe sa route.

Il arrive quelque chose de semblable dans la vie intérieure. Elle comporte des printemps et des étés, mais aussi des hivers, des jours sans soleil, des nuits sans lune. Nous ne pouvons pas permettre que nos rapports avec Jésus-Christ soient à la merci de nos sautes d’humeur, des changements de notre caractère. Ces attitudes trahissent l’égoïsme et la commodité et sont de toute évidence incompatibles avec l’amour.

Ainsi, qu’il vente ou qu’il neige, quelques pratiques de piété, solides, nullement sentimentales, bien enracinées et adaptées aux circonstances personnelles de chacun, seront comme ces balises rouges qui nous indiquent toujours la direction jusqu’à ce que le Seigneur décide que le soleil brille de nouveau, que la neige fonde, et que notre cœur recommence à vibrer, enflammé d’un feu qui, en réalité, ne s’était jamais éteint. Ce n’était que braises enfouies sous la cendre d’une épreuve momentanée, ou d’un effort relâché, ou d’un sacrifice insuffisant.

Contemplons maintenant sa Mère bénie, qui est aussi notre Mère. Au Calvaire, à côté du gibet, elle prie. Ce n’est pas là une attitude nouvelle chez Marie. Elle ne s’est jamais comportée différemment, quand elle remplissait ses devoirs, en s’occupant de sa maison. Au milieu de ses occupations courantes, elle demeurait attentive à Dieu. Le Christ, perfectus Deus, perfectus homo, a voulu que sa Mère qui est la plus éminente des créatures, celle qui est pleine de grâces, nous affermît elle aussi dans ce désir d’élever toujours notre regard vers l’amour divin. Rappelez-vous la scène de l’Annonciation : l’archange vient délivrer son message divin (l’annonce qu’elle serait Mère de Dieu) ; il la trouve en prière. Marie est entièrement recueillie quand saint Gabriel la salue : Salut, comblée de grâces, le Seigneur est avec toi. Quelques jours plus tard, elle laisse éclater sa joie dans le Magnificat : ce chant marial, que l’Esprit Saint nous a transmis grâce à la minutieuse fidélité de saint Luc, est le fruit des rapports habituels de la très Sainte Vierge avec Dieu.

Notre Mère a longuement médité les paroles des saints, ces hommes et ces femmes de l’Ancien Testament qui attendaient le Seigneur, ainsi que les événements auxquels ils ont été mêlés. Elle s’est émue devant cette succession de prodiges, devant le débordement de la miséricorde de Dieu pour un peuple si souvent ingrat. Cette tendresse divine, constamment renouvelée, fait jaillir ces mots de son cœur immaculé : Mon âme exalte le Seigneur et mon esprit tressaille de joie en Dieu mon Sauveur, parce qu’il a jeté les yeux sur son humble servante. Les fils de cette bonne Mère que sont les premiers chrétiens ont appris cela d’elle ; nous aussi nous pouvons, et nous devons, l’apprendre.

Nous nous sommes déjà engagés sur la voie de la prière. Comment continuer ? N’avons-nous pas remarqué comment bien des gens, hommes et femmes, semblent se parler à eux-mêmes et s’écouter avec complaisance ? C’est un flot de paroles presque continu, un monologue où ils reviennent inlassablement sur les problèmes qui les préoccupent, sans vraiment tenter de les résoudre, seulement mus peut-être par le désir morbide d’attirer la pitié ou l’admiration. Ils paraissent ne rien désirer de plus.

Si nous voulons vraiment épancher notre cœur, sans perdre la franchise et la simplicité, nous chercherons le conseil de personnes qui nous aiment, qui nous comprennent : on parle avec son père, avec sa mère, avec sa femme, avec son mari, avec son frère, avec son ami. C’est déjà là un dialogue, bien que souvent nous désirions plus nous épancher, raconter ce qui nous arrive, qu’écouter. Commençons à nous conduire de la sorte avec Dieu, certains qu’il nous écoute et qu’il nous répond. Écoutons-le attentivement, et ouvrons notre conscience à une humble conversation, pour lui rapporter avec confiance tout ce qui résonne dans notre tête et dans notre cœur : joies, tristesses, espérances, chagrins, succès, échecs, et jusqu’aux plus petits détails de notre journée. Parce que nous nous serons rendus compte que tout ce qui nous concerne intéresse notre Père céleste.

Repoussez, si elle se présente, la lâcheté, l’idée erronée que la prière peut attendre. Ne reportons jamais cette source de grâces. C’est maintenant le bon moment. Dieu, qui regarde avec amour toute notre journée, préside à notre prière intime : toi et moi, je l’affirme à nouveau, nous devons nous confier à lui comme on se confie à un frère, à un ami, à un père. Dis-lui — je le lui dis — qu’il est toute Grandeur, toute Bonté, toute Miséricorde. Et ajoute : c’est pourquoi je veux m’éprendre de toi, malgré la rudesse de mes manières, de ces pauvres mains que voici, usées et écorchées aux sentiers ardus et poussiéreux de la terre.

Ainsi nous marcherons, presque sans nous en rendre compte, l’allure divine, ferme et vigoureuse, avec au cœur la conviction intime que, près du Seigneur, même la douleur, l’abnégation, les souffrances sont aimables. Quelle force, pour un enfant de Dieu, de se savoir si près de son Père ! Aussi, quoi qu’il arrive, suis-je inébranlable, sûr avec toi, mon Seigneur et mon Père, qui es mon rocher et ma force.

Tout cela semblera peut-être familier à certains ; nouveau à d’autres ; ardu pour tous. Quant à moi, je ne cesserai de prêcher, jusqu’à mon dernier souffle, l’absolue nécessité d’être une âme de prière, et cela toujours, en n’importe quelle occasion et dans les circonstances les plus diverses, car Dieu ne nous abandonne jamais. Il n’est pas chrétien de penser à l’amitié de Dieu exclusivement comme à un ultime recours. Peut-il nous paraître normal d’ignorer ou de mépriser les personnes que nous aimons ? Évidemment non. Nos paroles, nos désirs, nos pensées vont continuellement vers ceux que nous aimons : c’est comme une présence continuelle. Il doit en être de même pour Dieu.

Cette recherche du Seigneur fait de toute notre journée une conversation intime et confiante. Je l’ai affirmé, je l’ai écrit bien souvent, et peu m’importe de le répéter, car notre Seigneur nous a fait savoir par son exemple que c’est le comportement le plus sûr : prier constamment, du matin au soir et du soir au matin. Quand tout se fait facilement : merci, mon Dieu ! Quand arrive un moment difficile : Seigneur, ne m’abandonne pas ! Et Dieu, doux et humble de cœur, n’oubliera pas nos supplications et ne restera pas non plus indifférent : Demandez et l’on vous donnera ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l’on vous ouvrira.

Efforçons-nous donc, en cherchant Dieu derrière chaque événement, de ne jamais perdre le point de vue surnaturel : dans ce qui est agréable et dans ce qui l’est moins, dans le réconfort… et dans l’affliction que nous cause la mort d’un être cher. Avant tout, parle à Dieu ton Père, en cherchant le Seigneur au centre de ton âme. Il n’y a là rien de futile ou de ridicule : c’est au contraire la manifestation évidente d’une vie intérieure constante, d’un véritable dialogue d’amour. Cette pratique ne peut produire en nous aucune déformation psychologique : elle doit être aussi naturelle pour un chrétien que le battement du cœur.

Prières vocales et prière mentale

Références à la Sainte Écriture
Références à la Sainte Écriture
Références à la Sainte Écriture
Références à la Sainte Écriture
Références à la Sainte Écriture