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3 points de « Quand le Christ passe » sont liés à la thématique Jésus-Christ → vie cacjée.

Comme pour tous les autres événements de la vie de Jésus, jamais nous ne devrions considérer ces années cachées sans nous sentir concernés, sans les reconnaître pour ce qu’elles sont : des appels que nous adresse le Seigneur pour que nous sortions de notre égoïsme, de notre confort. Le Seigneur connaît nos limites, notre attachement à nous-mêmes et à nos ambitions ; il connaît la difficulté que nous avons à nous oublier nous-mêmes et à nous donner aux autres. Il sait ce que c’est que de ne pas rencontrer d’affection, de constater que ceux-là mêmes qui prétendent vous suivre, ne le font qu’à moitié. Souvenons-nous de ces tristes scènes que nous décrivent les évangélistes où nous voyons les apôtres encore pleins d’aspirations temporelles et de projets purement humains. Mais Jésus les a choisis ; il les garde près de lui et leur confie la mission qu’il avait reçue du Père.

Nous aussi, il nous appelle, et nous demande, comme à Jacques et à Jean : potestis bibere calicem quam ego bibiturus sum ? : pouvez-vous boire le calice que je vais boire — ce calice du don absolu à l’accomplissement de la volonté du Père ? — Possumus ! ; oui, nous le pouvons ! Voilà la réponse de Jean et de Jacques. Vous et moi sommes-nous sérieusement disposés à accomplir, en toute chose, la volonté de Dieu notre Père ? Avons-nous donné au Seigneur tout notre cœur, ou continuons-nous à être attachés à nous-mêmes, à nos intérêts, à notre confort, à notre amour-propre ? N’y aurait-il pas en nous quelque chose qui ne serait pas en accord avec notre condition de chrétien et qui nous empêcherait de nous purifier ? C’est pour nous l’occasion de rectifier tout cela aujourd’hui.

D’abord il nous faut nous convaincre que c’est Jésus en personne qui nous pose ces questions : c’est lui qui les formule, et pas moi. Je n’oserais même pas me les poser à moi-même. Mais je continue ma prière à voix haute, tandis que vous, que chacun d’entre vous, confesse intérieurement au Seigneur : “Seigneur, comme je vaux peu de chose ! Comme j’ai été lâche, tant de fois ! Que d’erreurs, en cette occasion-ci, en celle-là, ici et là !” Et nous pouvons aussi nous exclamer : “Heureusement, Seigneur, que tu m’as soutenu de ta main, car moi, je me sens capable de toutes les infamies. Ne me lâche pas, ne m’abandonne pas, traite-moi toujours comme un enfant. Fais que je sois fort, courageux, constant. Mais aide-moi comme on aide un enfant sans expérience ; conduis-moi par la main, Seigneur, et fais que ta mère soit aussi à mes côtés pour me protéger. Et ainsi, possumus !, nous pourrons, nous serons capables de te prendre pour modèle.

Ce n’est pas présomption de notre part que d’affirmer ce possumus. Jésus-Christ nous apprend ce chemin divin et nous demande de l’entreprendre, car il l’a rendu humain et accessible à notre faiblesse. C’est pourquoi, il s’est tellement humilié. Voilà la raison pour laquelle il s’est abaissé, en prenant forme d’esclave, ce Seigneur qui, en tant que Dieu, était égal au Père ; mais il s’est abaissé en majesté et en puissance, non en bonté et en miséricorde.

La bonté de Dieu veut nous rendre le chemin facile. Ne repoussons pas l’invitation de Jésus. Ne lui disons pas non, ne soyons pas sourds à son appel : en effet, il n’y a pas d’excuse, nous n’avons pas de raison de continuer à penser que nous ne pouvons pas. Il nous a montré le chemin par son exemple. Je vous le demande donc avec insistance, mes frères : ne permettez pas que ce soit en vain que l’on vous ait montré un modèle si précieux, mais conformez-vous à lui et renouvelez-vous au plus profond de votre âme.

Il est passé sur terre en faisant le bien

Pertransiit benefaciendo. Qu’a fait Jésus pour répandre tant de bien, et seulement du bien, partout où il est passé ? Les Saints Evangiles nous ont transmis une autre biographie de Jésus, résumée en trois mots latins, qui nous donnent la réponse : erat subditus illis, il obéissait. Alors qu’aujourd’hui le climat est à la désobéissance, à la protestation, à la désunion, il nous faut estimer spécialement l’obéissance.

Je suis très attaché à la liberté, et c’est précisément pour cela que j’aime tant cette vertu chrétienne. Nous devons nous sentir enfants de Dieu et vivre avec le désir d’accomplir la volonté de notre Père ; réaliser les choses en fonction du vouloir de Dieu, parce que nous en avons envie — la raison la plus surnaturelle qui soit.

L’esprit de l’Opus Dei, esprit que je m’efforce de pratiquer et d’enseigner depuis plus de trente-cinq ans, m’a fait comprendre et aimer la liberté personnelle. Lorsque Dieu Notre Seigneur accorde sa grâce aux hommes, lorsqu’il les appelle à une vocation spécifique, c’est comme s’il leur tendait la main, une main paternelle, pleine de force et, surtout, remplie d’amour ; en effet, il vient nous chercher un par un, en nous considérant comme ses filles et ses fils, et il connaît notre faiblesse. Le Seigneur attend que nous fassions l’effort de prendre sa main, cette main qu’il met à notre portée : Dieu nous demande un effort, effort qui est la preuve de notre liberté. Et pour pouvoir le réaliser nous devons être humbles, nous devons nous considérer comme des petits enfants et aimer l’obéissance bénie avec laquelle nous répondons à la paternité bénie de Dieu.

Il convient que nous laissions le Seigneur s’introduire dans nos vies, y entrer avec confiance, sans y rencontrer d’obstacles ni de détours. Nous autres hommes, nous avons tendance “à nous défendre”, à nous attacher à notre égoïsme. Nous essayons toujours d’être des rois, même si ce n’est que du royaume de notre misère. Que cette considération vous aide à comprendre pourquoi nous avons besoin de recourir à Jésus : pour qu’il nous rende véritablement libres, et qu’ainsi nous puissions servir Dieu et tous les hommes. Ce n’est qu’alors que nous nous rendrons compte de la vérité de ces paroles de saint Paul : Mais aujourd’hui, libérés du péché et devenus esclaves de Dieu, vous avez pour fruit la sainteté et pour fin la vie éternelle. Car le salaire du péché, c’est la mort ; mais le don gratuit de Dieu, c’est la vie éternelle dans le Christ Jésus Notre Seigneur.

Soyons donc prévenus, car notre tendance à l’égoïsme ne meurt pas, et la tentation peut s’insinuer en nous de bien des manières. Dieu exige qu’en obéissant, nous exercions notre foi, car sa volonté ne se manifeste pas avec fracas. Il arrive en effet au Seigneur de suggérer son vouloir comme à voix basse, tout au fond de la conscience : il faut alors l’écouter avec attention, pour percevoir cette voix et lui être fidèles.

Mais, bien souvent, il nous parle à travers les autres, et il peut arriver qu’en voyant leurs défauts, ou en nous demandant s’ils sont bien informés, s’ils ont bien compris toutes les données du problème, nous nous sentions autorisés à ne pas obéir.

Or il y a peut-être une raison divine à cela, car Dieu ne nous force pas à obéir aveuglément. Il attend de nous au contraire une obéissance intelligente, et nous devons ressentir la responsabilité d’aider les autres avec la lumière de notre intelligence. Mais soyons sincères envers nous-mêmes: examinons, dans chaque cas, si c’est l’amour de la vérité qui nous pousse, ou si c’est l’égoïsme et l’attachement à notre propre jugement. Lorsque nos idées nous séparent des autres, lorsqu’elles nous amènent à rompre la communion, l’unité avec nos frères, c’est bien là le signe que nous n’agissons pas selon l’esprit de Dieu.

Ne l’oublions pas : pour obéir, je le répète, il faut l’humilité. Considérons de nouveau l’exemple du Christ : Jésus obéit et il obéit à Joseph et à Marie. Dieu est venu sur terre pour obéir, pour obéir aux créatures. Certes ce sont deux créatures très parfaites : sainte Marie, notre Mère — au-dessus d’elle, il n’y a que Dieu — et l’homme très chaste qu’est Joseph. Mais ce sont des créatures. Et Jésus, qui est Dieu, leur obéissait. Il nous faut aimer Dieu, afin d’aimer sa volonté, et d’avoir le désir de répondre aux appels qu’il nous adresse à travers les obligations de notre vie courante : dans notre devoir d’état, dans notre profession, dans notre travail, dans notre famille, dans nos relations sociales, dans nos propres souffrances et dans celles des autres, dans l’amitié, dans notre désir de réaliser ce qui est bon et juste.

Permettez-moi de revenir au naturel, à la simplicité de la vie de Jésus, que je vous ai déjà fait considérer tant de fois. Ces années cachées de la vie du Seigneur ne sont pas sans signification ; elles ne sont pas non plus une simple préparation des années à venir, celles de sa vie publique. Depuis 1928, j’ai clairement compris que Dieu désire que les chrétiens prennent pour exemple la vie du Seigneur tout entière. J’ai compris tout spécialement sa vie cachée, sa vie de travail courant au milieu des hommes ; le Seigneur veut, en effet, que beaucoup d’âmes trouvent leur voie dans ces années de vie cachée et sans éclat. Obéir à la volonté de Dieu est toujours, par conséquent, sortir de son égoïsme ; mais cela ne doit pas se réduire essentiellement à s’éloigner des circonstances ordinaires de la vie des hommes, nos égaux par l’état, la profession, la situation dans la société.

Je rêve — et le rêve est devenu réalité — d’une foule d’enfants de Dieu en train de se sanctifier dans leur vie de citoyens ordinaires, de partager les soucis, les idéaux et les efforts des autres créatures. J’ai besoin de leur crier cette vérité divine : si vous demeurez au milieu du monde, ce n’est pas que Dieu vous ait oubliés, ce n’est pas que le Seigneur ne vous ait pas appelés. Mais il vous a invités à poursuivre votre route parmi les activités et les soucis de la terre ; car il vous a fait savoir que votre vocation humaine, votre profession, vos qualités, loin d’être étrangères à ses divins desseins, ont été sanctifiées comme une offrande très agréable au Père.

Références à la Sainte Écriture
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